(Sud Quotidien 18/04/2012)
Les enseignants du supérieur qui ont décidé de reprendre le
chemin des amphithéâtres en attendant que les nouvelles autorités s'imprègnent
des urgences du pays, ont encore du mal à enseigner correctement à cause des
perturbations causées par les bacheliers non orientés. Toutefois les nouvelles
autorités auront du mal à satisfaire la plateforme du syndicat du supérieur à
cause de la situation difficile de la trésorerie nationale. Les
enseignants des universités publiques Sénégalaises bien qu’ayant officiellement
repris le chemin des amphithéâtres après trois mois de grève
(décembre2011-mars2012), déclenchée par le Syndicat autonome des enseignants du
supérieur (SAES), auquel ils sont quasiment tous affiliés, ont encore du mal à
fonctionner en plein régime.
Pour cause, les bacheliers non encore
orientés dont le nombre était estimé dans la première décade du mois d’avril
2012 à 5000, font chaque matin le tour des amphis et des salles de cours des
facultés pour forcer les étudiants à sortir.
Une situation que vient aggraver
les difficultés de trésorerie de l’Etat après la défaite du régime de Wade,
alors que l’essentiel des revendications des syndicats de l’élémentaire et du
supérieur, ont une forte incidence financière.
Il s’agit ainsi d’une nouvelle
donne qui menace sérieusement de perturber le redémarrage des enseignements
récemment réorganisés sur la base des derniers réaménagements du calendrier
universitaire afin de sauver l’année en cours que certains voyaient déjà
invalide.
Mamadou Ndiaye, le médiateur de l’Université Cheikh Anta Diop
qui s’active pour mettre un terme à la situation avertit: «si les perturbations
persistent jusqu’en fin avril, soit dans deux à trois semaines, l’année
universitaire sera cette fois-ci totalement compromise».
L’année
universitaire totalement réaménagée
Le réaménagement par consensus du
calendrier universitaire prévoit deux semestres dont le premier compte
12semaines de cours comprises entre le 2 avril 2012 et le 30 juin 2012. Ce
semestre sera suivi d’une semaine d’évaluation programmée entre le 24 et le
30juin 2012. Aux dires du médiateur de l’UCAD, cette session d’évaluation sera
conforme aux critères prévus par le système L.M.D en vigueur dans la sous
région.
Le deuxième semestre est compris entre le 1er juillet 2012 et le
30 septembre 2012 suivi d’une session d’évaluation programmée au mois de
novembre prochain. Ainsi, l’année universitaire sera composée de 24 semaines au
lieu de 25.
Ce qui ne peut nullement l’empêcher d’être valide, soutiennent
certains officiels du secteur qui rappellent que toutes ces dernières années, du
fait des grèves, les universités publiques Sénégalaises se contentent toujours
de 22 ou de 23 semaines de cours.
Seulement les autorités académiques des
universités publiques, particulièrement celles de l’Université Cheikh Anta Diop
(UCAD) semblent avoir pris conscience que jamais le réaménagement de l’année
universitaire en cours ne peut prospérer si les nouveaux bacheliers ne seront
pas tous orientés.
C’est dans ce cadre que le même médiateur de l’UCAD
Mamadou Ndiaye avait adressé justement une correspondance au directeur général
de l’enseignement supérieur et au responsable des affaires académiques de
l’institution pour attirer leur attention sur la situation des bacheliers non
orientés qui lui ont soumis leurs cas.
Les bacheliers autorisés à
s’inscrire dans le privé
Dans leur réponse ces autorités ont demandé au
médiateur d’informer tous les concernés qu’ils sont autorisés à aller s’inscrire
dans les établissements d’enseignement supérieur privés du Sénégal de leur
choix. La direction générale de l’enseignement supérieur et l’autorité des
affaires académiques de l’UCAD ont adjoint à leur correspondance la liste de
plus d’une dizaine de structures privées.
Seulement à la grande surprise
du médiateur, il dit avoir constaté que parmi tous les établissements listés
seule l’Université privée Amadou Hampaté Ba (AHB), était disposée à accueillir
un effectif d’un millier de bacheliers dans ses différentes disciplines. A
condition, selon ses responsables, que l’Etat s’engage à accorder à
l’institution une subvention conséquente.
Le même médiateur en informant
le collectif des bacheliers non orientés le jeudi 12avril dernier du résultat de
ses démarches, a obtenu auprès de celui-ci la décision d’arrêter les
perturbation des enseignements dans les différentes facultés et établissements
d’enseignement supérieur jusqu’à lundi prochain. Un répit qu’ils accordent ainsi
aux autorités pour leur permettre d’apporter une solution définitive à leur
problème sinon ils menacent de reprendre de plus bel leurs actions de
perturbations.
170 enseignants pour 27.000 étudiants
C’est
pourquoi le médiateur a sommé les autorités à agir vite et d’utiliser surtout
les grands moyens pour mettre un terme à la crise. Il s’agira, selon lui, de
tout faire pour renforcer les ressources budgétaires des facultés qui
accueillent le plus grand nombre d’étudiants comme la Faculté des Lettres et des
Sciences Humaines à l’UCAD qui compte à elle seule 27.000 étudiants pour
seulement 170 enseignants. Sans compter les 11.800 nouveaux bacheliers qui
frappent à ses portes et qui attendent l’autorisation de s’inscrire. Aux
dernières nouvelles il a été donné aux autorités de constater que parmi les 5310
bacheliers qui ont été orientés à la faculté des Lettres seuls 3900 sont
officiellement inscrits. C’est pourquoi elles ont décidé de procéder au
toilettage des listes pour permettre d’orienter de nouveaux bacheliers à la
place d’autres qui auront choisi d’aller ailleurs. En plus la FASEG vient de
signaler aux autorités de nouvelles possibilités pour elle d’accueillir quelques
bacheliers de la Série S et éventuellement ceux de la Série L2.
Toutefois
il urge de livrer à cette Faculté les 2 amphithéâtres de 1000 places chacune
ainsi que les 19 salles de cours pour une capacité totale de 3400 places, dont
les travaux sont déjà terminés. Mais cette livraison reste toutefois
conditionnée par le paiement de l’entrepreneur qui dit avoir préfinancé les
travaux sur fonds propres. Ce dernier a confié au médiateur de l’UCAD qu’il est
assez risqué pour lui de livrer les amphis et les salles de cours en question
avant de percevoir son paiement.
Mais pour résoudre définitivement le
problème d’accueil des nouveaux bacheliers, le médiateur de l’UCAD propose la
mise à disposition de l’enseignement supérieur de deux pavillons du Centre
International de Commerce et d’Echange (Cices) et un rallongement budgétaire de
l’ordre de 280millions de francs pour permettre de renforcer le niveau
d’encadrement des étudiants grâce à un important recrutement de nouveaux
enseignants dont l’offre existe déjà sur le marché.
Pour l’heure aucune
décision n’a encore été prise dans ce sens par le nouveau ministre de
l’enseignement supérieur parce que tout était suspendu à sa prise de fonction.
La passation du témoin entre les deux hommes n’a finalement eu lieu que la
semaine dernière. En plus, vu la situation difficile de la trésorerie de l’Etat
il semble illusoire de s’attendre à voir dans l’immédiat le règlement de toutes
les questions universitaires, à forte incidence financière.
Conscient de
cette situation Seydi Ababacar Ndiaye le patron du syndicat autonome des
enseignants du supérieur (SAES), a invité ses camarades à être « fermes mais
souples » dans la poursuite de leurs revendications. C’est-à-dire qu’ils devront
faire preuve d’esprit patriotique et accepter d’accompagner les nouvelles
autorités en place tout en leur fixant un délai raisonnable en vue du règlement
de leur plateforme revendicative. C’est l’option prise en définitive par le SAES
à l’issue de sa rencontre le week-end dernier à Thiès à l’issue de laquelle les
camarades de Seydi Abacar Ndiaye ont décidé de prolonger leur pause jusqu’au 15
mai prochain pour permettre aux nouvelles autorités de mieux s’imprégner des
urgences du pays.
A noter que depuis le début de l’année universitaire en
cours, en dehors des facultés de Médecine et celles des Sciences ainsi que les
écoles supérieures professionnelles telles que le Centre d’Etudes des Sciences
et Technique de journalisme de l’Information(CESTI), l’Ecole des Bibliothécaires
et Archivistes (EBAB) ou l’Ecole de Médecine Vétérinaire (EISMV), des
établissements intégrés aux universités, aucun autre département ou faculté
relevant d’une université publique Sénégalaise n’avait démarré de façon
effective ses enseignements au titre de l’année 2011-2012 avant le mercredi 28
mars dernier.
Publié le 18/04/2012 | 02H57 GMT par Mamadou Mika LOM
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