mardi 28 février 2012

Sénégal : l'électricité sera au coeur des priorités du prochain président

(Les Echos 28/02/2012)
Des générateurs d'électricité ont été loués par l'Etat sénégalais pour mettre fin aux délestages pendant la campagne électorale. En attendant l'arrivée de nouvelles centrales.
A Dakar, malgré l'incertitude politique, les habitants profitent d'un certain répit. Ceux qui promettaient que Dakar sombrerait de nouveau dans le noir le 27 février en sont pour leurs frais. Pour l'heure, les Dakarois bénéficient des générateurs loués par l'Etat sénégalais avant la campagne électorale. « Faire campagne avec des délestages était inimaginable pour l'actuel président Wade », commente un investisseur étranger. Excédés par les récentes coupures à répétition, les Dakarois s'interrogent toutefois sur le maintien des générateurs après la présidentielle. « Si l'Etat ne paie plus les locations, on replongera dans le noir », redoute un investisseur. Au lendemain du premier tour de la présidentielle de dimanche, l'incertitude politique est immense. L'opposant Macky Sall se dit « au coude-à-coude » avec Abdoulaye Wade et prédit un second tour. A l'inverse, dans le camp du président sortant, on estime qu'aucune « tendance lourde » ne se dessine. Une certitude : le futur président, quel qu'il soit, aura parmi ses vastes chantiers celui de l'énergie.
Location des générateurs
La location des générateurs est temporaire, des centrales intermédiaires -au fuel et moins coûteuses -puis d'autres, définitives, au charbon, prendront le relais dans quelques années afin « d'ancrer le Sénégal dans l'émergence économique », promet l'actuel ministre des Infrastructures Karim Wade en évoquant le plan Takkal. « Nous avons loué des générateurs à hauteur de 150 mégawatts pour faire des opérations de maintenance sur les centrales existantes et nous permettre d'absorber la croissance de la demande d'électricité, de 10 % par an », explique-t-il. Critiqué pour cette solution coûteuse, le fils de l'actuel président ajoute : « Les délestages ont coûté près de 1,4 % de PIB à l'économie sénégalaise, alors qu'en investissant 25 milliards de francs CFA (0,038 milliard d'euros) par an dans la location, on génère 125 milliards de francs CFA de PIB annuel. » « Toute l'Afrique de l'Ouest est en délestage, indique le banquier franco-béninois et président de PAI Partners, Lionel Zinsou. D'abord, en raison de la croissance. Dès qu'un pays franchit 5 % de croissance, le taux de demande solvable en électricité est d'une fois et demie la croissance du PIB. S'ajoutent à cela des réseaux de transport et de distribution souvent anciens. »
Réhabilitation des centrales
Pour pallier les difficultés, le Sénégal s'est engagé dans la réhabilitation des centrales existantes et des réseaux ; deux centrales de 125 mégawatts sont en construction et une troisième -pour laquelle Karim Wade affirme « être en discussion avec EDF et son partenaire chinois Datang » -est envisagée. Pour l'heure, la réforme du secteur de l'électricité s'appuie sur le prêt de 40 milliards de francs CFA (60 millions d'euros) accordé en juillet dernier et sur l'aide de la Banque mondiale. Le président Wade dit vouloir « électrifier tout le Sénégal en 2020 ». Un pari tardif, alors qu'il y a quelques années le Sénégal promettait déjà l'électrification du pays à hauteur de 75 % pour 2012. Même si les autorités disent avoir multiplié par quatre l'électrification depuis 2000, moins d'un quart des 13 millions de Sénégalais ont aujourd'hui accès à l'électricité.


MARIE-CHRISTINE CORBIER

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